DOSSIER RG n° : 07/00002 ORDONNANCE DU : 4 Juin 2007

AFFAIRE : Nicole P.

CODE : 14C

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE ST ÉTIENNE
JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION

ORDONNANCE RENDUE COMME EN LA FORME DES RÉFÉRÉS
DU 4 JUIN 2007

DEMANDERESSE

Mme Henriette P.

présente en Chambre du Conseil le 3 mai 2007 représentée par Maître CHEVALIER 1 rue des Martyrs de Vingré 42000 Saint Étienne

Mademoiselle Nicole P.

demeurant Hôpital Bellevue - 42055 SAINT ÉTIENNE CEDEX Absente en Chambre du Conseil le 3 mai 2007

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président André-Frédéric DELAY, Juge des Libertés et de la Détention

Ministère Public : Stéphanie BENOIT, Substitut

Greffier Lors des débats et du prononcé : Brigitte FLOREK, Greffier

DÉBATS En Chambre du Conseil du 03 Mai 2007.

 

MOTIFS

Vu l'article L3211-12 et les articles L3212-1 à L3212-11 du Code de la Santé Publique

Vu la requête de Madame Henriette P. datée du 23 Janvier 2007 et reçue le 25 Janvier 2007;

Vu les éléments d'appréciation fournis par l'hôpital Nord de Saint Etienne ;

Attendu que Mme Henriette P., par requête du 23 janvier 2007, a saisi le Juge des Libertés et de la Détention sur le fondement de l'article L 3211-12 du Code de la Santé Publique afin que soit ordonnée la mainlevée de l'hospitalisation d'office dont sa fille Nicole P., fait l'objet depuis le 24 octobre 1996 ;

Attendu que le dossier a été appelé une première fois, en l'absence de Nicole P. qui bien que régulièrement convoquée, n'a pas comparu à l'audience du 6 février 2007 ;

Qu'aux termes des débats, il a été décidé d'ordonner une expertise psychiatrique, le Docteur RUSSEL, expert psychiatre étant désigné pour y procéder, et de renvoyer le dossier à l'audience du 17 avril 2007 ;

Attendu que le Docteur RUSSEL a déposé son rapport le 21 février 2007, rapport notifié à Me CHEVALIER, conseil de la requérante, le 27 février 2007 ;

Que, suite au dépôt du rapport d'expertise, les parties, ainsi que Nicole P., ont été à nouveau convoquées pour l'audience du 17 avril 2007 ;

Qu'en l'absence de Nicole P. à cette audience, sa présence paraissant être sinon nécessaire du moins importante, il a été décidé de renvoyer une nouvelle fois l'examen du dossier à l'audience du 3 mai 2007 ;

Attendu que le 3 mai 2007, en l'absence de Nicole P. qui n'a pas comparu bien qu'elle ait été personnellement avisée de la date de l'audience, le dossier a été retenu.

Attendu que Me CHEVALIER, tant dans ses conclusions écrites, que oralement lors des débats soutient, d'une part que l'expert, désigné en la forme des référés, n'a pas respecté les règles du Nouveau Code de Procédure Civile pour procéder à son expertise et, d'autre part, au fond il explique que l'état psychique de Nicole P., tel qu'il est décrit dans le rapport ne correspond pas aux critères médicaux exigés dans le cadre d'une hospitalisation d'office, en particulier il relève que le Docteur RUSSEL ne dit pas que Nicole P. est dangereuse pour l'ordre public ; Qu'en définitive il demande :

- de prononcer la nullité de l'expertise,

- d'ordonner la mainlevée de la mesure d'hospitalisation d'office et la sortie immédiate de Melle Nicole P. "afin de rétablir une authenticité légale à laprise en charge de celle ci qui peut très bien continuer de gré à gré ou se poursuivre avec une H.D.T. sous la signature de Madame P. en qualité de tierce demanderesse", - subsidiairement si la suppression de la mesure d'hospitalisation d'office ne devait pas intervenir, désigner un nouvel expert qui accomplira sa mission dans le respect des règles applicables.

Sur la régularité de l'expertise

Attendu que si, effectivement le Docteur RUSSEL, expert psychiatre fréquemment désigné pour procéder à ce type d'expertise, n'a pas respecté à la lettre les formes prescrites par le Nouveau Code de Procédure Civile, notamment en ne convoquant pas le conseil de la requérante, (ce qui d'ailleurs ne correspond pas à la pratique habituelle en matière d'expertise psychiatrique) il n'en demeure pas moins qu'une copie du rapport a été très rapidement communiqué à Me CHEVALIER qui a ainsi été en mesure de faire toutes observations utiles, qu'en outre il ressort du rapport lui même que l'expert a, à plusieurs reprises, tenté d'expliquer à Nicole P. le but de sa visite ;

Que si, par ailleurs l'on considère la durée pendant laquelle la procédure s'est déroulée, les précautions qui ont été prises pour que toutes les personnes concernées par ce dossier, en particulier Nicole P., soit, dans toute la mesure du possible parfaitement en mesure de s'expliquer, il convient de considérer que le principe du contradictoire a été dans son essence respecté ;

Qu'en définitive si dans la forme le Docteur RUSSEL n'a pas effectivement procédé à son examen en présence du conseil de Henriette P., et de tout autre médecin qui aurait pu être convoqué, l'expertise doit néanmoins être considérée comme parfaitement régulière, les droits de chacune des personnes concernées par le dossier étant préservés ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de prononcer la nullité de l'expertise du Docteur RUSSEL.

Au fond

Attendu qu'au fond la requérante soutient que le Docteur RUSSEL décrit un tableau clinique qui correspond au cadre de l'hospitalisation à la demande d'un tiers et non à celui correspondant à une hospitalisation d'office puisqu'à aucun moment il n'est fait état d'une dangerosité de Nicole P. pour l'ordre public.

Attendu, cependant que la lecture de ce rapport, précis, circonstancié, fondé à la fois sur un examen minutieux du dossier médical de l'intéressée et sur son observation lors de l'entretien, montre que Nicole P. qui souffre "d'une schizophrénie paranoïde sévère", accompagnée de troubles du comportement a dû être hospitalisée depuis très longtemps en raison de passages à l'acte grave qui mettaient sa vie en danger (défenestrations, absorption d'alcali...), l'ordre public étant en cela troublé ;

Qu'il ressort par ailleurs de ce rapport que Nicole P. a, à plusieurs reprises, bénéficié de sorties d'essais qui toutes se sont soldées par des échecs et que, manifestement les rencontres mère/fille sont problématiques puisque à plusieurs reprises les visites de l'une à l'autre ont été interdites ;

Qu'enfin le Docteur RUSSEL conclut que la situation de Nicole P. s'inscrit depuis plusieurs années dans un processus de psychose majeure, l'ayant conduite à mettre sa vie en jeu, processus aujourd'hui peu évolutif et en tous cas qui se révèle maintenant non accessible à une quelconque thérapeutique curative ;

Attendu que, aux termes de cette analyse, il ressort clairement que Nicole P. est dans un état qui nécessite des soins, dans le cadre d'une hospitalisation d'office puisque elle souffre d'une pathologie qui l'a conduite à compromettre sa sûreté de façon grave ;

Qu'il convient par ailleurs de relever que l'argument selon lequel cette hospitalisation d'office pourrait être remplacée par une hospitalisation à la demande d'un tiers est sujette à caution si l'on considère, comme le relève le Docteur RUSSEL, que les relations entre la requérante et sa fille, sont de nature pathogène.

Qu'en définitive, le rapport du Docteur RUSSEL montre que Nicole P. présente des troubles mentaux qui justifient le maintien de son hospitalisation d'office, conformément aux exigences posées par l'article L 3213-1 du Code de la Santé Publique.

Attendu, que dans ces conditions, la requête présentée par Mme Henriette P. sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

 

Nous, André-Frédéric DELAY, Juge des Libertés et de la Détention au Tribunal de Grande Instance de Saint Etienne, statuant publiquement contradictoirement comme en la forme des référés après débats en Chambre du Conseil et par décision susceptible d'appel ;

Rejetons la demande de mainlevée d'hospitalisation d'office de Mademoiselle Nicole P. ;

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

                                                         LE GREFFIER                       LE JUGE DES LIBERTÉS

                                                                                                          ET DE LA DÉTENTION