COUR D'APPEL D'AGEN

Arrêt du 05 octobre 2005

 

RG N° : 04/01644

Martial CORLOUER

C/

CENTRE HOSPITALIER

Charles PERRENS

L'AGENT JUDICIAIRE DU

TRÉSOR PUBLIC

Prononcé à l'audience publique et solennelle du cinq octobre deux mille cinq, par Nicole ROGER, Présidente de Chambre, assistée de Dominique SALEY, Greffier,

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire,

ENTRE :

Monsieur Martial CORLOUER

Demeurant à 33170 GRADIGNAN

Monsieur Martial CORLOUER, agissant en qualité d'Administrateur légal de ses filles mineures,

représenté par la SCP Henri TANDONNET, avoués

assisté de Me Philippe REULET, avocat

 

DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION ordonné par l'arrêt rendu le 23 Septembre 2004, cassant et annulant un arrêt de la Cour d'Appel de BORDEAUX rendu le 05 Septembre 2002, et un arrêt de la Cour d'Appel de BORDEAUX rendu le 23 Janvier 2003, sur I'appel d'une ordonnance de référé rendu par le Président du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX en date du 5 Novembre 2001,

D'une part,

ET :

CENTRE HOSPITALIER CHARLES PERRENS pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège

Dont le siège social est 146 rue Léo Saignat - 33000 BORDEAUX

représenté par la SCP Guy NARRAN, avoués

assistée du Cabinet Yvon COUDRAY, avocats

L'AGENT JUDICIAIRE DU TRÉSOR PUBLIC agissant poursuites et diligences de son représentant légal actuellement en fonction domicilié en cette qualité audit siège,

Dont le siège social est 6 rue Louise Weiss - 75013 PARIS

Représenté par Me Jean-Michel BURG, avoué

assisté de la SCP DELMOULY-GAUTHIER-THIZY, avocats

DÉFENDEURS

D'autre part,

a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique et solennelle tenue en robes rouges, le 07 Septembre 2005, devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre faisant fonctions de Premier. Président, Jean-Louis BRIGNOL et Bernard BOUTIE, Présidents de Chambre, François CERTNER, Conseiller et Christophe STRAUDO, Vice-Président placé désigné par ordonnance du Premier Président en date du 16 juin 2004, assistés de Solange BELLUS, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La 9 décembre 1999, Martial CORLOUER, chirurgien-dentiste, était interpellé par les fonctionnaires de police alors qu'il se trouvait à son cabinet.

Placé en garde à vue, il était examiné le jour même par le docteur ASSENS qui établissait un certificat médical au terme duquel il diagnostiquait "une élaboration délirante à thématique de persécution. Existence d'une menace de passage à l'acte agressif sur des personnes désignées comme persécutrices et à l'origine d'un vaste complot judiciaire".

Un arrêté de placement provisoire était pris par le Maire de Bordeaux le 9 décembre 1999.

Martial CORLOUER était alors dirigé vers le Centre Hospitalier Spécialisé Charles Perrens à Bordeaux.

Le 10 décembre 1998. le docteur GOUBE établissait un certificat médical d'hospitalisation d'office et invoquait "un délire paranoïaque aigu avec un risque de passage à l'acte sur fond de conjugopathie (divorce) et centré sur le procureur adjoint".

Le même jour le docteur ETCHEGARAY, rappelant les menaces proférées à l'encontre des enfants d'un magistrat, établissait un certificat médical de vingt quatre heures au terme duquel il n'était pas en mesure de se prononcer sur la dangerosité du patient.

Il sollicitait l'avis d'un collège.

Le 11 décembre 1998, Martial CORLOUER était hospitalisé d'office au C.H.S. Charles Perrens en exécution d'un arrêté de M. le Préfet de la Gironde.

Les docteurs GERARD et BENEZCH, désignés par M. le Préfet de la gironde et par le Directeur des Affaires Sanitaires et Sociales de ce département, remettaient deux certificats médicaux les 21 et 28 décembre 1998 attestant que Martial CORLOUER présentait une psychose chronique paranoïaque le rendant dangereux pour l'ordre public et la sécurité des personnes.

Le 6 janvier 1999 le docteur ETCHEGARAY rédigeait un certificat mensuel préconisant un maintien de l'hospitalisation tout en évoquant la nécessité d'envisager très rapidement une sortie a l'essai de Martial CORLOUER.

Par arrêté du 8 Janvier 1999, M. le Préfet de la Gironde reconduisait pour une durée de trois mois la mesure d'hospitalisation d'office.

Par requête du 15 janvier 1999, Martial CORLOUER saisissait le Président du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux afin de solliciter sa sortie immédiate.

Le même jour, il introduisait devant le Tribunal Administratif de Bordeaux une procédure tendant à voir prononcer la nullité de l'arrêté du 11 décembre 1998 pour défaut de motivation.

Le 26 janvier 1999, il bénéficiait d'une sortie à l'essai.

Par ordonnance du 10 février 1999, le Président du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux désignait deux experts afin d'examiner Martial CORLOUER.

Le 8 mars 1999, M. Préfet de la Gironde prenait un arrêté d'abrogation de la mesure d'hospitalisation d'office.

Par ordonnance du 3 mai 2000 le Premier Vice-Président du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, en l'état des conclusions des rapports d'expertise judiciaire ordonnés le 10 février 1999, admettait le bien-fondé de la requête de Martial CORLOUER en l'absence d'éléments permettant de caractériser l'existence d'un trouble mental de nature à compromettre l'ordre public et la sécurité des personnes.

Ce magistrat constatait néanmoins que la demande de Martial CORLOUER était devenue sans objet en raison de la mainlevée de la mesure d'hospitalisation intervenue le 8 mars 1999.

Par jugement du 27,juin 2000, le Tribunal Administratif annulait l'arrêté de placement d'office du 11 décembre 1998 pour défaut de motivation.

Par exploit du 18 septembre 2001, Martial CORLOUER assignait en référé le Centre Hospitalier Charles Perrens et l'Agent Judiciaire du Trésor en paiement d'une provision de 100.000 francs à valoir sur la réparation de ses préjudices.

Par ordonnance du 5 novembre 2001 auquel il convient de se référer explicitement pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties et des motifs retenus, le Juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, retenant l'existence de contestations sérieuses, déclarait Martial CORLOUER irrecevable en ses demandes.

Dans des conditions de forme et de délai non contestées, ce dernier interjetait appel de cette décision le 12 novembre 2001.

Par arrêts rendus les 5 septembre 2002 et 23 janvier 2003 la Cour d'Appel de Bordeaux, considérant qu'il existait des contestations sérieuses sur le bien-fondé de la mesure d'hospitalisation d'office prise le 11 décembre 1999, confirmait la décision querellée.

Par arrêt du 23 Septembre 2004, la 2ème Chambre Civile de la Cour de Cassation, sous le visa des articles 5-5 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, 1382 du Code Civil, 809 al. 2 et 455 du Nouveau Code de Procédure Civile, annulait en toutes leurs dispositions les arrêts précités, considérant :

1°) que l'arrêté de placement d'office du 11 décembre 1998 avait été annulé par le Tribunal Administratif, de sorte que la créance de Martial CORLOUER contre l'État du chef des conséquences dommageables des irrégularités ayant entaché la mesure de placement d'office n'était pas sérieusement contestable,

2°) que la Cour d'Appel de Bordeaux s'était abstenue de répondre aux conclusions de Martial CORLOUER aux termes desquelles le CHS Charles Perrens était responsable de la faute commise par son préposé lequel avait signé le certificat médical ayant conduit à la mesure d'hospitalisation d'office, et ce en violation des dispositions de l'article L.342 du Code de la Santé Publique.

La cause et les parties étaient renvoyées devant la Cour d'Appel d'Agen.

Par déclaration déposée le 27 Octobre 2004, Martial CORLOUER saisissait la présente juridiction.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Au terme de ses ultimes écritures visées le 5 juillet 2005, Martial CORLUER sollicite l'entière réformation de la décision déférée ; il réclame la condamnation solidaire des intimés à la lui verser la somme de 2.000.000,00 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de ses préjudices économiques et moraux ainsi que celle de 5.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il sollicite par ailleurs en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs une provision de 50.000,00 euros à valoir sur la réparation de leur préjudice.

Il soutient en premier lieu que contrairement aux motivations retenues par le premier juge sa créance contre l'État n'est pas sérieusement contestable au regard des irrégularités ayant entaché la procédure d'hospitalisation d'office.

Il fait valoir en second lieu que les responsabilités du Centre Hospitalier Charles Perrens et de son préposé (le docteur ASSENS) ne sont pas sérieusement contestables au regard des conditions dans lesquelles s'est déroulée la procédure.

Il soutient à ce titre :

l°) que le docteur ASSENS :

- l'aurait examiné sans son accord au commissariat de police et sans avoir été réquisitionné par les autorités compétentes,

- l'aurait hospitalisé dans son propre service du C.H.S. Charles Perrens en violation des dispositions des anciens articles L.342 et L.343 du Code de la Sauté Publique qui interdisent à un psychiatre exerçant dans l'établissement d'établir un certificat médical circonstancié, alors même que le Maire de Bordeaux n'avait pris aucun arrêté et qu'il faisait l'objet d'une mesure de garde à vue,

- aurait commis des fautes médicales lourdes en attestant qu'il souffrait d'une pathologie mentale incurable et en demandant au docteur GOUBE de rédiger un certificat médicat d'hospitalisation d'office régularisant son propre certificat,

2°) que le directeur du C.H.S. Charles Perrens, garant du bon fonctionnement administratif de son établissement, n'aurait pas été en mesure de contrôler les dysfonctionnements du service des urgences, notamment :

- en acceptant son hospitalisation sans qu'un arrêté provisoire ne soit signé par le Maire de Bordeaux et en violation des dispositions des anciens articles L.342 et L.343 du Code de la Santé Publique,

- en transmettant au Préfet de la Gironde le certificat médical du docteur GOUBE comme premier certificat d'hospitalisation,

- en refusant de communiquer aux experts commis le dossier médical de Martial CORLOUER,

En réplique, le C.H.S. Charles Perrens conclut pour sa part à la confirmation de la décision déférée, à l'irrecevabilité des demandes présentées par Martial CORLOUER ès qualités de représentant légal de ses enfants ; il sollicite en outre l'allocation d'une somme de 3.000,00 euros à titre de frais irrépétibles.

Au soutien de ses conclusions visées le 20 juin 2005, il conclut à titre principal que la responsabilité de l'établissement ne saurait être fondée sur le défaut de motivation d'un arrêté préfectoral qui relève de la seule compétence du représentant de l'État.

il conteste pour le surplus les moyens développés par l'appelant en soutenant n'avoir commis aucune faute.

Il fait valoir à ce titre :

- que le docteur ASSENS a été requis dans le cadre d'une garde à vue en sa qualité d'expert près de la Cour d'Appel et non de praticien hospitalier,

- que l'arrêté préfectoral du 11 décembre 1999 vise le certificat médical du docteur GOUBE, qui n'exerce aucune fonction au sein de l'établissement,

- que le C.H.S. n'a jamais refusé de transmettre aux experts judiciaires le dossier médical de Martial CORLOUER mais ne pouvait le faire qu'avec l'accord de ce dernier,

En l'état de ses dernières écritures visées le 11 avril 2005, l'Agent Judiciaire du Trésor ne s'oppose pas à l'allocation d'une provision résultant du dommage causé par l'illégalité formelle de l'arrêté préfectoral précité.

Il soulève en revanche le caractère contestable de la créance résultant de l'absence de fondement médical de la mesure d'internement, s'appuyant notamment sur les cinq certificats médicaux établis par les docteurs ASSENS, GAUBE, ETCHEGARAY, GERARD et BENEZECH attestant de l'existence chez Martial CORLOUER à la date de son hospitalisation de troubles mentaux de nature à compromettre l'ordre public et la sécurité des personnes.

Il s'oppose enfin aux demandes nouvelles présentées pour la première fois par Martial CORLOUER en qualité de représentant légal de ses enfants.

II sollicite en outre une somme de 1.500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les moyens et prétentions des parties développés dans leurs ultimes écriture visées les 11 avril, 20 juin et 5 juillet 2005 ;

Vu les articles 5-5 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, 1382 du Code Civil et 809 al. 2 du Nouveau Code de Procédure Civile

I - Sur les demandes de Martial CORLOUER à titre personnel

1°) sur le caractère contestable de la créance alléguée par Martial CORLOUER

a) sur la créance à l'égard de l'État

Attendu que s'il relève de la compétence de la juridiction administrative d'apprécier la régularité d'une décision administrative ordonnant une mesure de placement d'office, il appartient à l'autorité judiciaire de statuer sur les conséquences dommageables des irrégularités affectant cette mesure par essence restrictive des libertés individuelles ;

Attendu que par décision rendue le 27 juin 2000, le Tribunal Administratif de Bordeaux a prononcé l'annulation de l'arrêté de placement d'office pris à l'égard de Martial CORLOUER le 11 décembre 1998 ;

Que le juge administratif a considéré que le Préfet de la Gironde n'avait pas satisfait aux exigences de l'ancien article L.342 du Code de la Santé Publique en s'abstenant de motiver sa décision ;

Qu'indépendamment de l'appréciation du bien fondé médical de cette mesure, il est incontestable que l'annulation de l'arrêté précité prive de tout fondement légal l'internement de Martial CORLOUER ;

Qu'il appartient en conséquence à l'État d'assumer les conséquences dommageables d'une telle irrégularité ;

Que la créance de Martial CORLOUER à l'égard de l'Agent Judiciaire du Trésor ne saurait en conséquence être considérée comme sérieusement contestable ;

Qu'il convient dès lors de réformer sur ce point la décision déférée ;

b) sur la créance à l'égard du Centre Hospitalier Spécialisé Charles Perrens

attendu que I'allocation d'une provision suppose l'existence d'une obligation non contestable ;

Que l'existence d'une telle obligation résulte de l'évidence de la solution du litige, et notamment du caractère non contestable de la faute alléguée lorsque l'action est introduite comme en l'espèce sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code Civil ;

Attendu que, martial CORLOUER a été examiné le 9 décembre 1999 par le docteur ASSENS ;

Qu'au vu de ce seul certificat médical rédigé par ce praticien exerçant au CHS Charles Perrens, un arrêté de placement provisoire au sein de cet établissement a été pris le jour même parle Maire de la Commune de Bordeaux ;

Que le lendemain le patient a été examiné par le docteur GAUBE (médecin n'exerçant aucune fonction au sein de l'établissement d'accueil) qui a délivré un certificat d'hospitalisation d'office ;

Que le directeur du CHS Charles Perrens a transmis le jour même un certificat de 24 heures rédigé par le docteur ETCHEGARAY, médecin de l'établissement ;

Que le 11 décembre 1998, le Préfet de la Gironde a pris un arrêté d'hospitalisation d'office ne visant que l'arrêté provisoire du Maire de Bordeaux et le seul certificat établi par le docteur ETCHEGARAY ;

Attendu que s'il n'appartient pas à un établissement d'accueil de se substituer à une juridiction en appréciant le régularité d'un acte présentant toutes les apparences de la légalité, il lui appartient néanmoins de s'assurer que cet acte répond aux exigences de forme imposées par la loi ou les règlements, et à défaut de prendre toute mesure de nature à éviter un internement arbitraire ;

Attendu que l'ancien article L.342 du Code de la Santé Publique nouvellement codifié impose qu'un arrêté d'hospitalisation d'office soit prononcé au vu d'un certificat médical circonstancié émanant d'un psychiatre n'exerçant pas dans l'établissement d'accueil ;

Attendu qu'en l'espèce, il est constant que la procédure de placement provisoire a été diligentée au vu d'un seul certificat médical rédigé par le docteur ASSENS, médecin exerçant au CHS Charles Perrens ;

Que l'arrêté d'internement pris par le Préfet de la Gironde s'est exclusivement référé à la mesure provisoire prise par le Maire de Bordeaux et à un certificat médical établi par un praticien de l'établissement d'accueil ;

Qu'elle ne comporte par ailleurs aucune référence au certificat médical circonstancié exigé par la loi ;

Attendu que ne répondant pas aux exigences formelles de l'article précité, cet acte était en conséquence dépourvu de toute apparence de légalité dès sa rédaction ;

Que malgré de telles irrégularités, il convient de relever que le CHS Charles Perrens n'a pris aucune mesure susceptible d'éviter un internement manifestement dépourvu de bases légales ;

Qu'il a en effet accepté d'accueillir Martial CORLOUER au vu d'un arrêté ne comportant aucun visa du certificat médical circonstancié exigé par la loi et se référant exclusivement à des certificats établis par des médecins exerçant dans l'établissement ;

Qu'if s'est abstenu d'informer l'autorité préfectorale de l'irrégularité de la procédure et l'impossibilité dans laquelle il se trouvait d'accueillir Martial CORLOUER au regard des dispositions de l'article L.342 du Code de la Santé Publique ;

Que l'existence de son obligation du chef des conséquences dommageables des irrégularités ayant entaché la mesure de placement de Martial CORLOUER ne saurait en conséquence être sérieusement contestable ;

Attendu qu'il convient dès lors de réformer également de ce chef la décision déférée ;

2°) Sur le montant de la provision

Attendu que Martial CORLOUER a été interné durant 48 jours ;

Que son placement d'office n'a été définitivement levé que le 8 mars 1999 ;

Que la mesure précitée a incontestablement porté atteinte à sa réputation ;

Qu'il convient de relever par ailleurs qu'engagé dans une procédure de divorce conflictuelle, Martial CORLOUER s'est vu priver en raison de cette mesure de l'exercice habituel d'un droit de visite et d'hébergement sur ses enfants durant plusieurs années ;

Que l'ensemble de ces éléments justifie en conséquence que lui soit allouée une somme de 60.000,00 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de ses préjudices ;

Qu'il convient en conséquence de condamner in solidum l'Agent Judiciaire du Trésor et le Centre Hospitalier Charles Perrens à lui verser cette somme.

II - Sur les demandes de Martial CORLOUER en qualité de représentant légal de ses filles

Attendu qu'aux termes de l'article 554 du Nouveau Code de Procédure Civile un intervenant volontaire ne peut demander par voie d'intervention en cause d'appel la réparation d'un préjudice personnel que lui ont occasionné les faits débattus en première instance ;

Qu'il ne peut par ailleurs soumettre un litige nouveau et demander des condamnations personnelles, n'ayant pas subi l'épreuve du premier degré de juridiction ;

Attendu qu'en l'espèce Martial CORLOUER, ès qualité de représentant légal de ses filles, entend intervenir volontairement à la procédure pour solliciter l'allocation de provisions fondées sur les préjudices subis par ses enfants du fait de son internement ;

Attendu qu'il sollicite en conséquence au nom de ses filles la reconnaissance de préjudices personnels occasionnés par les faits débattus en première instance ;

Qu'il soumet par ailleurs à la Cour un litige nouveau qui n'a pas subi l'épreuve du premier degré de juridiction ;

Qu'il convient en conséquence en application du texte précité de déclarer irrecevables ses demandes de ce chef.

III - Sur les frais irrépétibles et les dépens

Attendu qu'au regard des éléments de l'espèce, il serait inéquitable de laisser à la charge de Martial CORLOUER les frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;

Qu'il convient en conséquence de lui allouer de ce chef une somme de 4.000,00 euros ;

Attendu que succombant dans leurs prétentions, l'Agent Judiciaire du Trésor et le CHS Charles Perrens seront par ailleurs tenus par moitié aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire à l'égard de toutes les parties et en dernier ressort,

Vu l'arrêt rendu par la 2ème Chambre Civile de la Cour de Cassation le 23 septembre 2004,

Réforme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 5 novembre 2001 par le Juge des Référés du Tribunal de Grande Instance de Bordeaux,

Et statuant de nouveau,

Vu les articles 5-5 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, 1382 du Code Civil et 809 al. 2 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Dit que la créance de Martial CORLOUER contre I'État et le Centre Hospitalier Spécialisé Charles Perrens du chef des conséquences dommageables des irrégularités ayant entaché la mesure de placement d'office n'est pas sérieusement contestable,

Condamne in solidum l'Agent Judiciaire du Trésor et le Centre Hospitalier Spécialisé Chartes Perrens à lui verser à titre de provision la somme de 60.000,00 euros à valoir sur la réparation de ses préjudices ainsi qu'une somme de 4.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Dit que l'Agent Judiciaire du Trésor et le Centre Hospitalier Spécialisé Charles Perrens supporteront les dépens de première instance et d'appel, y compris ceux exposés devant la Cour d'Appel de Bordeaux, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile, dont distraction au profit de la SCP TANDONNET, avoués.

Ainsi fait et jugé les jours, mois et an susdits.

Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre et Dominique SALEY, Greffier présent lors du prononcé.

                       Le Greffier                                                                            La Présidente