2022-08-30 (Témoignage) "Les patients sont présumés malades"

• Pour citer le présent article : https://psychiatrie.crpa.asso.fr/826

Document du mardi 30 août 2022
Article mis à jour le 11 septembre 2022
par  A.B.

tem : Témoignages

2020-05-12 La cruauté en psychiatrie, parlons-en !

Pour retrouver cet article sur l’édition participative Les contes de la folie ordinaire, de Mediapart, cliquer sur ce lien


Témoignage reçu le 30/08/2022.

2022-08-30 Témoignage.

Le but est d’amener le patient a une coopération optimale aux soins imposés, cette coopération étant un gage de « bonne conduite », en utilisant la répression et la restriction des libertés ici considérées comme des soins qui « bénéficient » aux patients.

L’observation constante du patient ainsi que la notification de tous ses faits et gestes, sans vérification de la véracité des informations relatées, permet de pouvoir justifier a posteriori la prise en otage des droits du patient et de maintenir sur la durée une mesure de contrainte censée être provisoire.

Le médecin s’assure du soutien de l’entourage du patient. Il est épaulé par une équipe entièrement dévouée qui ne remettra jamais frontalement en cause ses directives. Les ordres venus d’en haut sont exécutés machinalement par un personnel soignant dénué d’empathie et de compassion.

Le médecin référent bénéficie d’un ascendant sans limites sur son patient. Il s’agit clairement d’un rapport de domination/soumission qui lui donne les pleins pouvoirs pour une durée indéterminée.

Le cadre de la loi est insuffisamment protecteur et les rares contrôles se fondent quasi uniquement sur la base du/des certificats médicaux. Un tel déséquilibre ne peut être que malsain et faciliter les abus. Contrairement au prévenu qui est présumé innocent, le patient est présumé malade. Quand le doute bénéficie à l’accusé il est un élément à charge pour le malade.

Ainsi certaines mesures sont prolongées a priori pour des questions de facilité de prise en charge et pour s’assurer de la « coopération » du patient dans le cas où celui-ci jugerait les soins inappropriés et souhaiterait participer à l’élaboration de sa prise en charge.

En plus d’enfermer, d’isoler, d’humilier et de déshumaniser le patient, le psychiatre crée souvent un contentieux avec l’entourage en insistant auprès d’un tiers pour que celui-ci consente une mesure de soins sur demande d’un tiers (SDT) profitant de la détresse et du sentiment d’impuissance de ceux-ci face aux problématiques de leur proche, dans le but de faciliter et de réduire les démarches administratives et les garanties nécessaires à l’hospitalisation sous contrainte.

Dans bien des cas le patient est amené à se couper de l’entourage et se développent ranœur et incompréhension mutuelles. Il se retrouve alors encore plus isolé et vulnérable. Il se sent abandonné de tous, de la justice, et de ses proches.

La phrase qui revient régulièrement : "c’est pour ton bien", est l’argument principal avancé par l’entourage du patient et l’équipe médicale. Elle semble être le symptôme d’un aveuglement collectif visant à se rassurer sur le bien-fondé et la nécessité d’une telle mesure aussi traumatisante soit-elle pour la personne. Un autre argument qui vient renforcer cette auto -conviction est que c’est « la seule solution ».

C’est ainsi qu’on retrouve en hôpital psychiatrique des gens aux pathologies très diverses qui n’ont rien à faire ensemble mais qui ont été mis là par défaut, après une errance et/ou des échecs thérapeutiques. On peut y retrouver majoritairement des personnes psychotiques, schizophrènes, délirantes, borderline, démentes etc. Mais aussi des personnes dépressives ou souffrant de troubles de la conduite alimentaire (TCA) qui se retrouvent dans un environnement très anxiogène et insécurisant pour elles.

Une fois en HP vous êtes étiqueté comme « fou » quel que soit le degré de folie. Une personne saine d’esprit peut ainsi se retrouver à côtoyer des personnes gravement atteintes ayant des trajectoires personnelles particulièrement sombres. Tout va être fait pour l’associer et la convaincre qu’elle est elle-même définitivement atteinte.

Parler de soins sous de pareils augures tient de la gageure.