2017-03-24 C.A. Versailles • Irrégularité du différé de 24 heures pour une mainlevée sur irrégularité de la mesure

• Pour citer le présent article : https://goo.gl/9iiESC ou http://psychiatrie.crpa.asso.fr/632

Document du vendredi 24 mars 2017
Article mis à jour le 27 août 2020
par  H.F., A.B.

Sur notre site internet : 2015-01-15 Cassation • Obligation de motiver l’effet différé de 24 h d’une mainlevée d’une hospitalisation complète


Note introductive - CRPA

2017-03-24 Ordonnance de la Cour d’appel de Versailles.

En pièce jointe une intéressante ordonnance prise par la Cour d’appel de Versailles le 24 mars 2017, sur conclusions et plaidoirie de Me Raphaël Mayet avocat au Barreau de Versailles.

Cette ordonnance infirme par la voie d’un appel limité, une ordonnance du juge des libertés et de la détention de Pontoise qui avait levé une mesure de soins sur décision du représentant de l’État avec un effet différé de 24 heures. La Cour d’appel de Versailles considère dans cette ordonnance, que du fait de l’irrégularité constatée, l’effet différé de 24 heures ne pouvait pas assortir la décision du JLD de Pontoise de lever cette même mesure, puisque cela aurait eu pour effet de proroger sous une autre forme la mesure déclarée irrégulière.

En faisant droit à un tel moyen cette ordonnance de la Cour d’appel de Versailles va à l’encontre d’un arrêt de la Cour de cassation du 15 janvier 2015, n°13-26758, publié au Bulletin de la Cour qui avait rejeté un pourvoi similaire contre une ordonnance de la Cour d’appel de Dijon du 18 janvier 2013.

La Cour de cassation avait motivé son rejet du pourvoi par l’attendu suivant : "Mais attendu que l’article L 3211-12 III qui permet au juge des libertés et de la détention d’assortir d’un délai différé maximal de 24 heures l’ordonnance de mainlevée d’une hospitalisation complète ne distingue pas entre les raisons, de fond et de forme, pour lesquelles la mainlevée est décidée ; que le moyen est dépourvu de tout fondement …", d’où le rejet par la Cour de cassation du pourvoi en question.

L’ordonnance du 24 mars 2017 de la Cour d’appel de Versailles ici obtenue par Me Raphaël Mayet opère ainsi un revirement de jurisprudence. S’agit-il d’une décision d’espèce ou sera-t-elle confirmée à un moment ou à un autre par un arrêt de la Cour de cassation ; ou bien au contraire la Cour de cassation maintiendra-t-elle sa jurisprudence du 15 janvier 2015 ? C’est désormais toute la question.


Mails de Me Raphaël Mayet au CRPA

29 mars 2017.

OBJET : Précisions.

Cher Monsieur,

Je fais suite à notre échange de ce jour.

L’ordonnance du Premier Président de la Cour d’Appel de Versailles du 24 Mars dernier mérite à mes yeux un commentaire un peu plus développé que celui que je vous avais précédemment fait parvenir.

En premier lieu, il convient de rappeler les faits à l’origine de l’ordonnance du JLD de Pontoise. Une personne avait été placée en soins sur décision du représentant de l’État (SDRE) au Centre Hospitalier d’Eaubonne. Il avait fait l’objet d’une hospitalisation complète puis d’un programme de soins. Un arrêté préfectoral de maintien de la mesure avait été pris au début du mois de décembre 2016 et était à l’évidence irrégulier puisque sa date était surchargée, de sorte qu’il était permis de douter qu’il ait été pris dans les délais prévus par la Loi pour le renouvellement d’une telle mesure.

Postérieurement à cet arrêté, le patient fut réintégré en hospitalisation complète. Dans le cadre du contrôle systématique à 12 jours le juge des libertés et de la détention de Pontoise avait autorisé le maintien de la mesure.

Le père de l’intéressé a saisi le juge des libertés et de la détention d’une demande de levée de la mesure de soins de son fils en faisant valoir l’irrégularité de l’arrêté qui avait maintenu la mesure de soins antérieurement à la réintégration.

En second lieu, il convient de rappeler que le JLD avait retenu l’irrégularité, levé l’hospitalisation complète et différé l’effet de sa décision de 24 heures pour permettre la mise en place d’un programme de soins.

Le Premier Président a été saisi d’un appel de la personne hospitalisée et de son père limité à la question de la mise en place d’un programme de soins dans les 24 heures de la levée de la mesure. Le parquet et le Préfet n’avaient quant à eux pas fait appel de l’ordonnance. Ainsi, et c’est tout l’intérêt de l’appel limité, l’irrégularité de l’arrêté de maintien de la mesure et la levée de l’hospitalisation complète ne pouvaient plus être remises en cause.

Au cas d’espèce, il me semble que l’irrégularité du maintien de la mesure antérieurement à la réintégration en hospitalisation complète s’opposait à ce que la levée soit différée de 24 heures pour permettre la mise en place d’un programme de soins. S’il n’y avait pas eu réintégration en hospitalisation complète, le juge n’aurait pu au regard de l’irrégularité retenue que lever la mesure de soins sans consentement.

Si la décision rendue par le Premier Président de la Cour d’Appel de Versailles peut de prime abord sembler contradictoire avec la position de la Cour de Cassation, ce n’est pas une évidence car la vraie question à mes yeux est la suivante : le programme de soins mis en place dans le cadre d’un effet différé est-il la continuité de la mesure d’hospitalisation levée sous une autre forme ou une nouvelle mesure de soins qui ne prendrait pas appui sur une précédente mesure dont l’irrégularité a été constatée ?

Une réponse à cette question devra nécessairement être apportée pour clarifier la situation.

Votre bien dévoué,

Maître Raphaël Mayet, avocat à la Cour. Cabinet Mayet et Perrault


Mail de Me Raphaël Mayet au CRPA

29 mars 2017.

OBJET : décision intéressante.

Monsieur,

Je vous prie de trouver, ci-joint, une ordonnance intéressante rendue le 24 mars dernier par le Premier Président de la Cour d’Appel de Versailles qui considère que lorsqu’une levée d’hospitalisation est ordonnée au motif de l’irrégularité d’un arrêté de maintien de la mesure, cette levée d’hospitalisation ne peut avoir un effet différé pour permettre la mise en place d’un programme de soins.

La mise en place d’un tel programme n’étant pas possible en raison de l’irrégularité de la mesure.

Je vous prie de croire, Monsieur, à l’expression de mes sentiments les meilleurs.

Maître Raphaël Mayet. Avocat à la Cour. Cabinet Mayet et Perrault.