Uzès, le 5 avril 2013.
Bonjour,
Veuillez trouver ci joint la « charte d’utilisation des données de santé » qui est proposée (imposée ?) au CH d’Uzès, et la réponse que j’adresse à l’ensemble des praticiens et acteurs de soins (et non de contrôle social !).
Cordialement,
Philippe Gasser, psychiatre des hôpitaux.
Chers Collègues,
Je suis extrêmement surpris de constater que la charte du « bon usage des données de santé », « proposée » (??) à la signature lors d’une dernière réunion de « formation » (??) informatique comprend une demande de VERIFICATION DE L’IDENTITE des citoyens qui s’adressent à nous pour recevoir des soins ou qui nous sont adressés (. y compris sans leur consentement !).
Il ne me semble pas en effet du rôle des soignants , et encore moins de celui des secrétaires médicales de se transformer ainsi en acteur du contrôle social . même (et surtout ) sous prétexte de « rendre service » au dieu informatique qui désormais, allié à la déesse « économie » , semble composer les deux mamelles de notre activité au dépens et au mépris du sens même de notre fonction clinique … Je vous invite, à ce sujet , à visionner sans retard l’excellent film de Philippe BOREL , « Un monde sans humains » (réalisateur du précédent « monde sans fous »") …
Outre que cet alinéa « vérificateur » semble en totale contradiction avec les déclinaison suivantes de bonnes intentions et de confidentialité, je rappelle qu’il nous est tous arrivé, dans nos pratiques de nous trouver confronter avec des « alias » , des usurpateurs ou des manipulateurs, des « napoléons » , « Jésus » . ou « X » , et qu’il appartient à la totale liberté du patient + citoyen , et à sa Folie, de se présenter à nous sous l’identité de son choix … A nous ensuite d’en faire, avec lui , nos fruits cliniques !
Pour mémoire je rappellerai que cet avatar identitaire s’est également produit pour des patients adressés par la maison d’arrêt (où, sans doute, ils avaient déjà été bien « contrôlés » !) , et que cette dimension prenait alors tout son sens dans l’histoire et la trajectoire du patient …
Enfin, et de manière citoyenne , il n’appartient aucunement aux soignants , aux secrétaires médicales ou aux assistantes sociales de procéder à de quelconques vérifications que ce soit qui touchent à la vie privée de la personne et à ses libertés individuelle. L’histoire nous apprend aussi qu’il n’y a qu’un pas de la vérification à la délation, et nous savons bien également que certaines affaires récentes , concernant notamment des personnes « sans papiers » et ayant reçu une OQTF (Obligation de quitter le territoire français), ont déjà fait les frais de ce « procédé » …
Je trouve extrêmement choquant qu’une telle « charte » ait pu être validée par la CME (Commission médicale d’établissement) , et en réfère dans l’instant à nos instances tutélaires et syndicales, ainsi qu’à la Ligue des droits de l’Homme , afin qu’interpellation soit également portée auprès du Président de la CME , compte tenu du glissement identitaire qu’elle comprend et dont nous percevons malheureusement (et sans aucune paranoïa, hélas) l’idéologie à laquelle elle pourrait elle même, insidieusement, s’identifier.
Cordiales salutations.
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