2012-02-08 - Le Conseil d’État renvoie au Conseil constitutionnel 4 articles de la loi psychiatrie du 5 juillet 2011

• Pour citer le présent article : http://goo.gl/XZvlN ou http://psychiatrie.crpa.asso.fr/202

Document du mercredi 8 février 2012
Article mis à jour le 28 août 2020
par  A.B.

Sur ce même sujet, cf. l’article : 2011-07-18 Décrets d’application de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins sans consentement.

Voir une dépêche de l’Agence Presse Médicale qui éclaircit ce sujet, en quatrième point du présent article.

— Pour les suites de cet arrêt de renvoi, cliquer sur ce lien.

— Sur la reprise de l’instance devant le Conseil d’état, cf. : 2012-06-06 - La nouvelle ministre de la Santé défend mordicus la loi sarkozyste du 5 juillet 2011 .


Communiqué du CRPA - 2012-01-25

Nous vous informons que le Conseil d’État examinera la demande de transmission au Conseil constitutionnel des questions prioritaires de constitutionnalité posées par le CRPA, portant sur 11 articles de la loi du 5 juillet 2011 relative aux soins sans consentement, à son audience du mercredi 1er février 2012, à 14h. Voir à ce sujet un article du Monde du 2 août dernier qui exposait cette stratégie.

2011-11-18 Conclusions sur QPC (2) devant le Conseil d’État
2011-11-18 Conclusions sur QPC (1) devant le Conseil d’État

Ci-joint au format Pdf le texte de nos conclusions à fin de questions prioritaires de constitutionnalité telles qu’elles ont été enregistrées au Conseil d’État par notre avocat le 18 novembre 2011.

Est en jeu la question de savoir si le Conseil d’État va accepter — ou refuser — de transmettre au Conseil constitutionnel ces questions prioritaires de constitutionnalité visant la loi du 5 juillet 2011. Ces questions ont été posées dans le cadre de deux recours en annulation déposés par le CRPA contre les deux décrets d’application pris le 18 juillet 2011 pour l’exécution de la loi du 5 juillet 2011.

Parmi ces QPC, une question sur l’absence de contrôle judiciaire des programmes de soins sous contrainte, et d’autres sur la constitutionnalité du sort réservé aux médico-légaux ainsi qu’aux personnes qui ont été placées en Unités pour malades difficiles (U.M.D.).

Le Conseil d’État, tenu par le délai de 3 mois, rendra son délibéré avant le 17 février prochain.

Nous connaîtrons le sens des conclusions du rapporteur public au Conseil d’État sans doute lundi 30 janvier prochain, et nous serons fixés plus avant lors de l’audience, avec la lecture détaillée des conclusions du rapporteur public. Celui-ci conclura-t-il à la transmission de nos questions prioritaires au Conseil constitutionnel ? C’est désormais toute la question.

Cette audience revêt une nette importance pour toutes celles et tous ceux qui sont concernés par le champ de la contrainte psychiatrique, et son extension non contrôlée à des catégories de la population toujours plus amples.


« Sens des conclusions du Rapporteur public » - 2012-01-31

Mme Maud Vialettes, rapporteur public au Conseil d’État, nous fait savoir qu’elle va conclure à l’audience du 1er février 2012 dans cette affaire :

— au renvoi de la QPC au Conseil constitutionnel en ce qui concerne la question de la conformité à la Constitution de l’article L. 3211-2-1, de l’article L. 3211-12 (II), de l’article L. 3211-12-1 (3° de son I) et de l’article L. 3213-8 du code de la santé publique ;

— à ce qu’il n’y ait lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la QPC en ce qu’elle concerne les articles L. 3211-3, L. 3211-12-1 (IV), L. 3211-12-4 (troisième et quatrième alinéas), L. 3213-1 (I), L. 3213-4 (troisième alinéa), L. 3214-1 et L. 3216-1.

CRPA : Le Conseil constitutionnel va devoir se pencher sur la constitutionnalité des programmes de soins sous contrainte qui ne connaissent pas, actuellement, de contrôle judiciaire ; sur celle de la procédure actuelle de contrôle de la légalité des internements des médico-légaux objets de déclarations d’irresponsabilité pénale ; et sur l’intervalle de 6 mois entre chaque contrôle judiciaire de plein droit. C’est à dire sur des points parmi les plus problématiques pour les libertés individuelles, de la loi du 5 juillet 2011 relative aux soins sans consentement.


Conseil d’État, Décision de renvoi au Conseil constitutionnel : Extrait de l’arrêt (Dispositif) - 2012-02-08

2012-02-08 Conseil d’État, Arrêt de renvoi de QPC
Renvoi au Conseil constitutionnel sur requête du CRPA, de 4 articles du code de la santé publique issus de la loi du 5 juillet 2011

1. — Pour l’Arrêt intégral comportant la motivation de la décision, voir pièce jointe.

Site du Conseil d’État, la décision intégrale au format Html :
http://arianeinternet.conseil-etat….

2. — Mentions au dossier sur l’interface Sagace du Conseil d’État

« Analyse :

Requête par laquelle l’ASSOCIATION CERCLE DE RÉFLEXION ET DE PROPOSITION D’ACTION SUR LA PSYCHIATRIE (CRPA) demande au Conseil d’État : 1. — d’annuler le décret n° 2011-846 du 18 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques ; 2. — de mettre à la charge de l’État le versement de la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

État du dossier : Attente décision de fond

Arrêt [relatif à QPC] du 08/02/12 (en cours de notification),
1re et 6e sous-sections réunies du 01/02/2012 (14:00:00) :

Dispositif :

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l’article L. 3211-2-1, du II de l’article L. 3211-12, du 3° du I de l’article L. 3211-12-1 et de l’article L. 3213-8 du code de la santé publique, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-1083 du 5 juillet 2011, est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : Il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par l’association CRPA en tant qu’elles portent sur l’article L. 3211-3, sur le IV de l’article L. 3211-12-1, sur les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 3211-12-4, sur le deuxième alinéa du I de l’article L. 3213-1, sur le troisième alinéa de l’article L. 3213-4, sur l’article L. 3214-1 et sur le deuxième alinéa de l’article L. 3216-1 du code de la santé publique, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-1083 du 5 juillet 2011.

Article 3 : Il est sursis à statuer sur les requêtes de l’association CRPA jusqu’à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché les questions de constitutionnalité ainsi soulevées. »


Dépêche de presse : Soins sans consentement : le suivi ambulatoire renvoyé devant le Conseil constitutionnel

Agence Presse Médicale, Hélène Mauduit, Grand Reporter,
Paris le 8 février 2012, 17h04

Le Conseil d’État a décidé mercredi de renvoyer devant le Conseil constitutionnel quatre dispositions de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins sans consentement en psychiatrie en question prioritaire de constitutionnalité (QPC), dont celle sur le suivi ambulatoire sous contrainte.

Ce renvoi conduira le Conseil constitutionnel à statuer sur la conformité à la Constitution de ces quatre articles ou alinéas d’articles du code de la santé publique.

Il est décidé à la suite d’une contestation devant le Conseil d’État du décret n°2011-846 du 18 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques, un des quatre décrets d’application de la loi du 5 juillet 2011. Le Conseil d’État a été saisi en novembre 2011 par le Cercle de réflexion et de proposition d’action sur la psychiatrie (CRPA), une association de défense des droits des patients en psychiatrie.

La procédure est possible parce que la loi adoptée par le Parlement n’a pas été déférée devant le Conseil constitutionnel avant sa promulgation, une stratégie juridique demandée aux parlementaires par le CRPA, rappelle-t-on (cf. APM HMOFR004).

Le 2° de l’article L. 3211-2-1, renvoyé devant le Conseil constitutionnel, définit le suivi ambulatoire sous contrainte désigné par une prise en charge « sous une autre forme » que l’hospitalisation complète « incluant des soins ambulatoires, pouvant comporter des soins à domicile, dispensés par un établissement (…) et, le cas échéant, des séjours effectués dans un établissement ».

Le Conseil d’État note que l’article ne précise pas « dans quelle mesure et selon quelles modalités de contrôle du juge des libertés et de la détention (JLD) un ’séjour’ peut être imposé au patient » et que cette modalité de prise en charge porte atteinte à la liberté individuelle.

De fait, la loi a étendu le contrôle du JLD sur les hospitalisations sous contrainte mais il ne contrôle pas la nouvelle modalité de prise en charge, introduite dans la loi, qu’est le suivi ambulatoire sous contrainte.

Le Conseil d’État renvoie aussi le 3° du I de l’article L. 3211-12-1 qui instaure un contrôle systématique du JLD six mois après une mesure d’hospitalisation sous contrainte, alors que le premier contrôle a lieu 15 jours après la mesure. Il note l’obligation d’un « intervalle de six mois » pour le contrôle de plein droit du juge.

Le Conseil d’État renvoie aussi le II de l’article L. 3211-12 sur l’obligation pour le JLD, lors des contrôles de plein droit des soins sur décision du représentant de l’État (SDRE, ex-hospitalisation d’office - HO), de recueillir l’avis d’un collège interne à l’établissement quand le patient a été hospitalisé en unité pour malades difficiles (UMD), et, quand le patient a été déclaré irresponsable pénalement, d’un collège d’experts psychiatres.

Il relève que les conditions de mainlevée sont distinctes pour ces patients, ce qui pourrait représenter une rupture d’égalité.

De même, est renvoyé l’article L. 3213-8 sur les modalités de levée par le préfet des SDRE des patients déclarés irresponsables pénalement et des patients ayant été hospitalisés en UMD. Dans ce cas aussi, le Conseil d’État relève que des conditions de mainlevée sont spécifiques.

En revanche, le Conseil d’État a rejeté les demandes de QPC sur sept articles ou alinéas du projet de loi, notamment parce que la question soulevée n’a « pas de caractère sérieux » ou a déjà été tranchée :

— possibilité d’appel du procureur sur une décision de mainlevée et de l’effet suspensif de cet appel en cas de risque d’atteinte grave à l’intégrité du malade ou d’autrui (3° et 4° de l’article L. 3211-12-4)
— possibilité pour le JLD de différer sa décision en cas de « circonstances exceptionnelles » (IV de l’article L. 3211-12-1)
— signalement au préfet d’antécédents d’hospitalisation en UMD ou de SDRE après une déclaration d’irresponsabilité pénale (deuxième alinéa du I de l’article L. 3213-1)
— faculté du préfet de mettre fin à des SDRE après avis d’un psychiatre ou sur proposition de la commission départementale des soins psychiatriques (troisième alinéa de l’article L. 3213-4)
— obligation d’hospitalisation complète pour les soins psychiatriques sous contrainte des détenus (article L. 3214-1)
— affirmation que l’irrégularité d’une décision administrative de soins sous contrainte n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne (deuxième alinéa de l’article L3216-1).

Le CRPA estime que le Conseil constitutionnel devrait rendre sa décision vers la mi-avril.

hm/ab/APM polsan