2011-11-11 Le Parisien révèle un rapport de l’IGAS qui dresse un état des lieux terrifiant de l’EPSM de Clermont-de-l’Oise

• Pour citer le présent article : http://goo.gl/RQaJ7 ou http://psychiatrie.crpa.asso.fr/182

Document du vendredi 11 novembre 2011
Article mis à jour le 27 août 2020

Nous observons, et ce n’est pas un hasard, que ce rapport de l’IGAS n’est révélé quant à son contenu, que plusieurs mois après la clôture des débats au Parlement qui ont mené à l’adoption de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins sans consentement. Or cette loi, sur bien des points, consolide la maltraitance institutionnelle traditionnelle qui règne sur les patients psychiatriques pris en charge dans les institutions. Le lecteur voudra bien conclure…


« Pas de bonne psychiatrie dans des locaux indignes »

Source : http://www.leparisien.fr/oise-60/pas-de-bonne-psychiatrie-dans-des-locaux-indignes-11-11-2011-1714320.php

Publié le 11.11.2011

Nos révélations sur le rapport confidentiel de l’inspection générale des affaires sociales, pointant des « maltraitances institutionnelles » et des « conditions d’accueil des malades indignes » à l’hôpital psychiatrique de Clermont, n’ont pas laissé indifférents. Hier, représentants politiques et dirigeants de l’établissement, l’un des dix plus grands de France dans sa spécialité, sont revenus sur l’épais document rédigé fin 2010.

En 220 pages, l’inspection générale (Igas) décrit « un établissement qui offre le meilleur et le pire » et demande une « reprise en main de tous les personnels ». Locaux en mauvais état et mal aménagés, « pratiques soignantes défaillantes », l’enfermement « en permanence » employé dans certains services sont notamment épinglés.

Depuis la remise de ce rapport, des corrections ont été apportées et d’autres sont en cours, comme le précise François Maury, directeur par intérim. « C’est en bonne voie et, d’ici à quelques semaines, nous ferons un premier point », explique-t-il. Conseiller général des établissements de santé, rattaché à l’Igas, il a pris la tête de Clermont après le départ contraint de la directrice, en mai. Le fait que le rapport soit resté confidentiel n’est « pas un manque de transparence », selon François Maury, estimant qu’il fallait laisser le temps à l’établissement de réagir.
« On ne fera pas de bonne psychiatrie dans des locaux vétustes et indignes. Il y a nécessité pour l’hôpital de balayer devant sa porte », admettait hier André Vantomme, vice-président socialiste du Conseil général et président du conseil de surveillance de l’hôpital de Clermont. Et de poursuivre : « L’Igas a fait un contrôle et nous a permis de faire preuve de lucidité sur nous-mêmes. Mais il faut que cet exercice soit partagé, lance-t-il en ciblant l’État et le manque de soutien financier dont a souffert l’hôpital. On ne peut pas faire vivre un établissement comme Clermont sans qu’on y consacre les moyens nécessaires. » Même remarque du côté de la CGT, le syndicat majoritaire : « Pendant des années, on a dit en interne qu’il fallait rénover. »

Une enquête à la suite d’un signalement

L’inspection générale a été saisie en 2010 par la ministre de la Santé de l’époque, Roselyne Bachelot, à la suite d’un signalement. Trois enquêteurs ont visité cet hôpital de 900 lits répartis sur 2 gigantesques sites, à Clermont (13 ha) et Fitz-James (60 ha). Leur rapport s’achève sur 54 recommandations dont plus d’une vingtaine à effet immédiat. « On n’a pas la même façon de voir les choses », estime Alain Mougas, de la CGT, à propos du rapport de l’Igas. Lui préfère se concentrer sur le personnel qu’il décrit « en souffrance ».

Le Parisien


"Oise. L’hôpital de Clermont épinglé pour maltraitance institutionnelle" : premier article du Parisien du 10 novembre 2011, rendant public le rapport de l’IGAS)

Source : http://www.leparisien.fr/oise-60/oise-l-hopital-de-clermont-epingle-pour-maltraitance-10-11-2011-1712262.php

HÔPITAL PSYCHIATRIQUE DE CLERMONT (OISE), VENDREDI. Sur la base du rapport de l’inspection générale des affaires sociales, quelques mesures ont été prises pour tenter de corriger les dysfonctionnements constatés par les experts.

« Conditions d’accueil des patients indignes », « maltraitance »… Un rapport confidentiel de l’inspection générale des affaires sociales (Igas), dont notre journal a pu prendre connaissance, critique violemment le fonctionnement de l’hôpital psychiatrique de Clermont, dans l’Oise, l’un des dix plus grands hôpitaux de France dans sa spécialité.

Ce document de 220 pages rédigé à la fin 2010 n’a jamais été publié, par crainte, nous dit-on, de l’impact social qu’il aurait pu avoir — l’établissement étant l’un des principaux employeurs de la région. Depuis, quelques mesures ont été engagées pour tenter de corriger certains « dysfonctionnements » épinglés par les experts. En mai dernier, notamment, la directrice a été forcée au départ. Mais, comme le soulignent les familles des patients et le directeur de l’établissement lui-même (lire ci-dessous), l’essentiel reste à faire. Trois points principaux émergent de ce document.

Des faits avérés de « maltraitance institutionnelle ». Ils sont dus notamment à la grande vétusté des bâtiments. « Dans un pavillon, par ailleurs sordide, les plafonniers centraux [des chambres] sont allumés vingt-quatre heures sur vingt-quatre, pratique que la Cour européenne des droits de l’homme a jugé en 1984 contraire à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. » Dans la même unité, « pas de sanitaires dans les chambres (…), des WC situés dans la salle de bains, qui est fermée à clé la nuit, ce qui oblige les patients à utiliser un seau hygiénique », relève l’Igas.

Des « pratiques soignantes défaillantes » et des protocoles thérapeutiques pas toujours réévalués. L’état physique et vestimentaire des patients (parfois en « guenilles »), l’enfermement « en permanence » pratiqué dans certains services (malgré un parc très vaste) sont également mis en cause dans le rapport. « Tout cela ne peut être qualifié d’ordinaire de la psychiatrie, mais relève d’une mauvaise prise en charge, d’un abandon des malades », précise l’enquête.

Le rapport n’épargne pas non plus les médecins. « Assiduité trop faible », « absences non justifiées », « laxisme », égrène l’Igas, qui estime « le temps perdu médical à l’équivalent de 24 postes de médecin ».

L’établissement ne se résume toutefois pas au pire. L’Igas le rappelle aussi dans son rapport, citant des « services de très grande qualité », comme l’unité récente de Compiègne. Une maison d’accueil spécialisée (MAS) ultramoderne de 60 places a ouvert le 2 novembre, près de Clermont. Elle accueille des patients dont certains étaient jusqu’alors hospitalisés dans les pavillons « indignes ».

Le Parisien